YOU'LL NEVER STOP ME!!!

On s'arrête jamais hein... Bon histoire de proposer un rp plus avancé, d'occuper l'insomnie et d'avancer certaines idées que j'avais oubliées, un rp qui se situe mettons deux trois ans avant la reprise, histoire de faire avancer le perso pendant l'ellipse car tout ce que j'avais fait était très peu de temps après le scénario.

Alors qu’elle regardait défiler les hypocrites et les flatteurs, Xiltyn rêvait d’évasion. Les travaux qui avaient aidé Marchevent à grandir avaient enterré Bral sous sa forge, quoique d’après ce qu’elle en voyait au cours de leurs nombreuses parties d’échec, il n’en était que ravi, et cela faisait des années que l’elfe elle-même ne quittait plus son bureau et sa salle de conseil. Elle observait ainsi un ingénieur au physique improbable se gargariser de la réussite de la modernisation du temple de Gond, pourtant flambant neuf, mais qu’on ne cessait de trouver dépassé tous les ans. Chaque année c’était la même rengaine, on voulait lui faire bénéficier d’une découverte architecturale révolutionnaire, on retravaillait les fondations, on lissait les rides du vieux Gond pour qu’il garde sur son visage bonhomme la fraîcheur du progrès. Et évidemment, on réclamait de l’argent, des moyens, et on s’épuisait en courbettes et en flatteries pour obtenir les ressources qui permettraient de donner vie à ces rêves de création. L’ingénieur agitait ainsi son ventre fourmillant d’idées sous le regard désabusé de Xiltyn, qui s’étonnait chaque jour un peu plus de la façon dont pouvaient remuer les lèvres de ces orateurs formés à la syntaxe des maillets et à la période des écrous, sans qu’aucun son ne parvienne plus à ses oreilles lassées, irrémédiablement attachées au silence. La seule chose qui la distrayait encore était d’observer Sovessil du coin de l’œil, et de lui jeter en cachette des regards pleins de promesses contre l’ennui, même s’il fallait bien avouer que ces perspectives étaient souvent modérées par des obligations maternelles bien plus sages et raisonnables. En y réfléchissant, ils avaient connu une période d’insouciance et de bonheur assez courte, assez vite envahie par des responsabilités pesantes contre lesquelles ils se battaient tous les jours. D’un autre côté, ce qu’ils avaient perdu en passion, ils l’avaient gagné en harmonie, et le couple mûrissait tranquillement au soleil de l’âge, toujours plus serein et solide. La petite Tara, qui était d’ailleurs devenue la seule Tara du palais, n’en finissait pas d’étonner Xiltyn, qui se reconnaissait en elle un peu plus chaque jour. Enfin, la jeune femme apprenait que ses défauts pouvaient avoir quelque chose d’adorable et de touchant lorsqu’elle les voyait transposés dans ces yeux ravissants d’innocence.

L’audience fut vite expédiée, l’ingénieur repartit les bras chargés d’or et de suffisance, tandis que Xiltyn se hâtait de s’isoler de ce monde qu’elle trouvait de moins en moins passionnant à mesure que sa tâche s’était accomplie et que Marchevent était en chantier. L’importance de la reconstruction avait été grisante, car elle lui avait fait sentir qu’on avait besoin d’elle, mais depuis que le relai avait été passé aux ouvriers de ce futur, elle ne faisait plus que donner les accords nécessaires à la réalisation des projets brillants et fous de ces aventuriers du grand ouvrage, Bral en tête. La gloire des combats était bien loin, mais il avait bien fallu rester panser les plaies de la ville. En définitive, il ne fallait pas s’étonner si ceux qui étaient restés soutenir la voûte branlante de cette épave qu’était Eauprofonde ressemblaient aujourd’hui, tout piliers qu’ils soient, à de vieilles ruines. Sur ces vieilles pierres, on donnait des ailes aux cités, et on aimait avec toute l’énergie possible la jeunesse qui était amenée à supplanter les anciens, dans l’espoir d’en faire des êtres dignes de ce nom. Tionne avait pu apprendre ici tout ce qu’elle avait bien voulu auprès de Xiltyn et Sovessil, et de tous les membres de la famille qui avaient pris part à son éducation. La petite Tara suivrait le même chemin, les enfants de Thog n’avaient manqué de rien non plus, et s’étaient tous montré à la hauteur dans leur domaine. Ce vieux Thog traversait ses vieux jours avec une mine ravie et fière, à juste titre. Il avait formé admirablement les Tournecranes, les soldats d’élite qui formaient la garde rapprochée de Xiltyn. Sa tristesse avait été immense quand il avait refusé d’en prendre le commandement, mais elle ne pouvait l’empêcher de garder son indépendance jusqu’au bout, et de pouvoir se consacrer pleinement à lui-même et un peu moins aux autres, pour changer. Il se montrait de toute façon admirable comme chef des armées, et passait beaucoup de temps au temple de Tempus. Xiltyn avait appuyé le développement de ce culte dans la ville, pour Thog et pour sa garde en premier lieu, un bien maigre geste pour son vieux compagnon d’armes.

Ses réflexions furent bientôt interrompues par le souffle d’un certain paladin dans son cou, alors que ses mains avaient déjà attrapées les siennes qui couraient autour de sa taille, comme par anticipation. L’un comme l’autre devinaient leurs mouvements avant même de se toucher, comme si la familiarité entre eux avait fini par développer une sorte d’instinct de l’autre. Sovessil lui demanda :
« Tu es encore bien sombre aujourd’hui, envie de pourfendre du quémandeur ?
-J’en ai assez de ces entretiens complètement vides, soupira-telle, plus ils s’épuisent à gonfler mon importance, plus mon inutilité dans tout ce processus me saute aux yeux.
-Je comprends, moi-même je commence à en avoir plus qu’assez de ces contraintes aliénantes, mais tu peux être fière de toi, tu restes fiable même quand tes yeux quittent les émissaires pour regarder… ailleurs…
-Tu t’accordes trop d’importance, ce n’est pas toi que je regardais mais le rideau juste derrière, je songeais à le faire changer, dit-elle en souriant.
-Je sais que tu te sens un peu isolée, reprit-il plus sérieusement, mais tu tiens ta place comme il faut.
-Je veux bien te croire, mais c’est aussi très ingrat de tenir ces responsabilités. Je n’arrive toujours pas  m’empêcher de penser que notre temps est compté, et que nous nous sommes peut-être un peu vite gâché la vie ».
Au bout de quelques années, Xiltyn avait fini par exprimer ses craintes, il était difficile de couvrir ses angoisses nocturnes aussi longtemps, et l’abcès avait été percé dès qu’elle s’était trouvée suffisamment en confiance pour avouer le contenu de la prophétie à Sovessil.
« Tu dis cela, mais tu aurais pu perdre n’importe qui d’autre sans que cela te soit prédit, est-ce que tu as profité d’eux comme tu aurais dû ? Si tu avais vu venir le départ de Tara…
À ces mots, la voix de Xiltyn se durcit terriblement.
-Ne me parle pas de cela. Elle a fait son choix, c’était son envie.
-Tu devrais t’apaiser sur cette question, répondit-il doucement.
-À vrai dire, je laisse tomber, pour de bon cette fois, mais n’en parle pas, c’est tout. Je ne m’intéresse qu’à ceux qui restent. Les autres peuvent bien recevoir l’indifférence qu’ils ont cherché comme une gloire.
Un silence assez lourd passa entre eux, et la jeune femme changea de sujet :
« J’ai quand même un regret tu sais, celui de n’avoir jamais vraiment pris la route avec toi.
-Comment cela ?
-Tu sais, sur la route. Nous nous sommes affrontés, on s’est prêtés main forte une fois ou deux, mais nous n’avons jamais vraiment affronté le danger ensemble, sur les chemins. Je t’imagines souvent tu sais, en armure, au coin du feu, veillant près de moi.
-Ah, je vois, l’archonte rêve de jouer à nouveau sa vie dans les grandes plaines. Avec son capitaine en armure, pourfendant tous deux les trolls et les ogres à la pointe de l’épée. Soulageant leur peine dans une passion torride au clair de lune. »
Xiltyn rougissait de voir sa naïveté ainsi dévoilée.
« Tu as raison, ce serait probablement décevant, d’autant que dès que je commencerai à entrevoir ton vrai pouvoir, j’en deviendrai follement jalouse et je voudrai ta mort. Des disputes affreuses, une rupture consommée, la petite Tara vivra chez Thog. Ignoble. Par contre des trolls et des ogres ? Nous sommes meilleurs que cela, tu pourrais avoir plus d’ambition pour notre quête héroïque.
-J’aurais bien aimé aussi, tu sais. Te voir courir, frapper, hurler de rage dans le feu de la bataille. Te transformer en cette furie venimeuse qui m’a si bien vaincu, sur la jetée de Havremain ».
La nostalgie passait sur leurs sourires, et leurs yeux se perdaient dans une foule de souvenirs.
« J’ai écrit à mon père, d’ailleurs, dit Xiltyn.
-S’il y a bien une chose qui me chagrine, c’est que lorsque j’évoque de tels moments, tu penses à ton père…
-Je me suis dit qu’il saurait peut-être, pour le sort…
-Ah ! Oui, pour Tulia.
-Peut-être arriverais-tu à l’apprendre aussi d’ailleurs, en tout cas je ne désespère pas de trouver quelque chose. Ça m’ennuie de l’admettre évidemment, mais le corps d’ombre n’a rien de très différent de ce sort. Et comme je ne ressens plus aucune sensation physique, ou aucune douleur quand je le lance, je me dis que ça pourrait la soulager efficacement, pour quelques heures de liberté par jour.
-Vu l’état de la toile, je doute qu’il soit facile de trouver quelqu’un qui soit capable de nous faire bénéficier de son savoir.
-Voilà qui pourrait demander une entreprise longue et périlleuse… répondit-elle en souriant de nouveau.
-Avec un coin du feu et des combats dangereux ? Demanda-t-il malicieusement.
-Par exemple. Qui sait… Cela pourrait-être ça, notre escapade pour vieux accrocs au danger.
-C’est tentant, nous verrons bien si nous apprenons quelque chose là-dessus, ce sera peut-être l’occasion ».
On frappa à la porte :
« Excusez-moi, archonte, mais c’est au sujet d’une affaire assez grave qui risque de faire scandale et…
-J’arrive, soupira-t-elle ».
Sovessil la regarda pester avec un sourire amusé et une pointe de tristesse dans le regard, puis le bal des entretiens vitaux et essentiels pour l’avenir de Marchevent reprit de plus bel.